Séminaire ICARE : L’innovation est-elle source de progrès : à quel prix ? Vendredi 16 décembre 2005 à Paris LES PARADOXES DU PROGRÈS
Sur le lit de mort de madame Bovary,durant la veillée funèbre,deux ennemisirréconciliables s’affrontent :l’abbé Bournisien,ignare et sectaire et le pharmacienHomais,libre penseur,héritier des Lumières qui vomit la superstition et les ténèbres del’Eglise.L’abbé Bournisien ne connaît qu’un seul livre,la Bible et ne se reconnaît qu’un seulmaitre :Dieu.Homais lui ne croit qu’en la Science qui brise les préjugés des prêtres etaffranchit l’homme des sornettes bibliques pour le rendre maître et possesseur de la nature.Legénie de Flaubert dans ce dialogue savoureux n’est pas de prendre parti pour la soutane oul’apothicaire,c’est de montrer dans cet affrontement les deux visages d’une même bétise :labétise religieuse et la bétise scientiste.Ce qui frappe dans les propos échangés,c’est leur exactesimilitude :l’abbé comme le pharmacien récitent tous deux un catéchisme.La science ne veuttuer la foi que pour être déifiée à son tour,s’enfermer,elle aussi dans des certitudesinébranlables.D’ailleurs au petit matin,Bournisien et Homais,poussés par une même faim,semettent à trinquer et attaquent un solide repas en s’avouant : »Nous finirons bien par nousentendre ». En dépit de l’avertissement de Flaubert,le progrés continue ou plutôt il s’estdégradé en invention perpétuelle.Nous avons perdu l’espérance des Lumières de concilierl’avancée morale de l’homme avec celle des techniques,de la prospérité,de l’instruction.Noussommes devenus plus riches,plus éclairés,nous ne sommes pas devenus meilleurs.Le XX°siècle n’a pas éradiqué la barbarie du cœur des peuples puisqu’il aura au contraire poussél’industrialisation de la mort dans les camps nazis et soviétiques jusqu’à ses extrèmes.C’estpourquoi le progrés fait désormais l’objet d’un culte ambigüe :il est moins une espérancequ’un fait établi,le lot d’une société qui produit,quoiqu’il arrive,son comptant de nouveautésdans tous les domaines.Et le progressisme,c’est à direla croyance dans les vertus del’avenir,tient à la fois d’un combat et d’un constat :il est un mélange de volontarisme et desuivisme.Qui n’est pas progressiste à cet égard,même à droite,même au sein de ceux qu’onnomme les conservateurs ?Le mouvement pour le mouvement nous emporte et il ressemble deplus en plus à un changement impitoyable.La fête du progrés ne s’arrete jamais,elle nousépargne la doube impasse de l’angoisse,il n’y a pas de vide et de la saturation,le désir est sanscesse relancé. La difficulté,c’est qu’il n’y a pas un progrés mais des progrés localisés,eux-mêmes paradoxaux parce que producteurs de regression et parfois de dégâts majeurs,la vachefolle,l’amiante ,le sang contaminé sans oublier les conséquences funestes surl’environnement.Telle est la sagesse désenchantée de ce début de siècle :nous savons quenotre marche en avant se paye de reculs terrifiants,que chaque conquête est aussi un terrainperdu et que l’humanité va simultanément et d’un même pas vers le meilleur et vers le pire.Onaurait tort toutefois de croire morte et entérrée notre foi dans l’amélioration possible del’espèce humaine.Nous sommes des croyants dégrisés qui aspirons à des progrésmaitrisés.Dégrisement ne veut pas dire désespoir.C’est pourquoi les désillusions du progréssont purement romantique et n’ont jamais poussé personne à refuser l’électricité , à revenir àla carriole à cheval ou à bloquer la recherche.Et l’on ne peut que déplorer à cet égard que la
France,sous la poussée de lobbies moralisants,ait criminalisé le clonage thérapeutique,laissantà d’autres pays le soin de prospecter dans ce domaine prometteur. Quiconque a subi un jourune opération chirurgicale,a été sauvé par un antibiotique sait ce que le mot progrés veut direet n’a nul besoin de lourds traités explicatifs.
J’en viens donc maintenant à notre sujet proprement dit. Les grandesconquêtes de la modernité,la réduction du temps de travail,l’élimination de la mortalitéinfantile,l’allongement de la durée de la vie sont considérées désormais non comme desvictoires extraordinaires mais comme des acquis.Mieux encore comme des dûs :nous lesméritons du seul fait que nous existons.Non seulement nous ne manifestons aucune gratitudepour les progrès époustouflants de la médecine mais nous nous scandalisons de son incapacitéà venir à bout de toutes les maladies :incurable est le seul mot obscène du vocabulairecontemporain.Le miracle de l’invention permanente est devenu routine et nous exigeonschaque jour,surtout dans le domaine de la santé des perfectionnements rapides.Les progrés dela médecine interviennent dans une société contradictoirement individualiste etsécuritaire : « Fichez moi la paix,occupez vous de moi »,tel pourrait être le slogan du citoyencontemporain.Il voit l’Etat comme une instance famililiale qui doit le protégér quand il en abesoin sans le limiter dans ses moindres fantaisies.Tous les songes les plus anciens del’humanité,vaincre la mort en partie,freiner le vieillissement,changer de corps,desexe,d’identité,de visage seront bientôt rendus possibles grâce à l’habileté de nos chercheurset de nos chirurgiens.Le biologiste peut reprogrammer le vivant,il ne se contente pas desoigner,il recrée.Tous les prodiges sont à notre portée,La médecine est riche de toutes lespromesses :elle entretient l’individu dans la religion de l’avidité et dans le fantasme de latoute puissance.Avec elle, le possible devient souhaitable,le souhaitable nécessaire.Nous luiattribuons naivement l’omnipotence de la magie.Aucune borne ne doit limiter nosappétits.Tant de maux ont été vaincus ;on s’étonne qu’ils ne puissent tous l’être dansl’heure.L’artifice devrait évacuer le principe de réalité.Aux calamités classiques s’ajoutentcelle de ne pouvoir venir à bout du malheur comme tel,à commencer par celui de lamaladie,du vieillissement et de la mortalité.La civilisation crée autant de souffrances qu’elleen résout :non seulement ses règles nous pèsent mais en érigeant le bien-être en norme,ellerend plus intolérable encore l’adversité normale de l’existence.Elle nous pousse à ne plus fairela différence entre les détresses corrigibles et la misère inhérente à la conditionhumaine.Beaucoup d’observateurs l’ont noté :on ne meurt plus aujourd’hui parce que lamachine est usée et qu’il faut mourir un jour,on meurt toujours de quelque chose,défaillancecardiaque,rupture d’anévrisme,cancer comme si la mort elle-même était une anomalie dont onpouvait venir à bout. Effet paradoxal :la crainte de la maladie grave,ont noté les sociologues,se propage aufur et à mesure des triomphes de la science sur les anciennes pathologies,nous en venons « àsouffrir de la santé » comme le disait déjà Georges Duhamel en I930 dans le docteurKnock.Mieux encore :les progrès médicaux inversent le sens du mot santé.Celui ci devraitsignifier en principe l’indifférence au corps considéré comme un compagnon docile qui sait sefaire oublier et nous suit dans tous les moments de la vie, « le silence des organes » avait ditautrefois le professeur Leriche.Voila qu’aujourd’hui l’obssession de la santé parfaite tend àmédicaliser chaque instant de la vie au lieu de nous autoriser une agréable insouciance.Cela se
traduit d’abord par l’annexion au domaine thérapeutique de tout ce qui relevait jusque la del’ordre du savoir-vivre :à commencer par la nourriture qui ne se départage plus entre bonne etmauvaise mais entre saine et malsaine.La table devient un comptoir de pharmacie où l’on pésesoigneusement graisses et calories,ou l’on mâche avec conscience des aliments qui ne sontplus déjà que des médicaments.Comme si l’important désormais n’était plus de vivrepleinement le temps qui nous est imparti mais de tenir le plus longtemps possible :la duréedevient une valeur canonique,même si on doit la conquérir au prix de terriblesrestrictions.Puisque la vie est une maladie mortelle,on doit dés l’enfance se sauver de quelquechose,d’une tension trop haute,d’une digestion imparfaite,d’une prédisposition auxrhumatismes,aux affections cardio-vasculaires.L’idéal thérapeutique devient une idée fixe quine nous quitte jamais et que nos proches,les médias ,l’école nous rappellent incessement.Aunom de cette norme surhumaine,encore aggravée par le dépistage génétique,nous devenonstous des invalides potentiels qui scrutent avec angoisse leurs kilogs superflus,leur rythmecardiaque,l’élasticité de leur peau.Etrange acharnement à s’examiner,à se fustiger et qui faitde notre corps,comme jadis dans le christianisme,le lieu d’une menace latente.D’où cettedemande illimitée de services médicaux, pharmaceutiques,esthétiques,chirurgicaux destinés àaméliorer notre satisfaction,freiner notre dégradation,atténuer l’angoisse.Autant de stupéfiantsparfaitement licites et analogues au soma du Meilleur des Mondes de Huxley,censés tel leProzac ou la mélatonine réguler nos humeurs,nous protéger de l’adversité,nous maintenirjeunes jusquà la fin.Avec le danger propre aux remèdes miracle de délégitimer le mal devivre,de frapper la difficulté d’être du sceau de l’infirmité.La santé a ses martyrs,sespionniers,ses héros,ses saints mais dans tous les cas,elle doit nous coûter,par toutes sortes decontrôle,de surveillances.Avec le temps,elle devient indéfinissable,annexe tous les domainesde l’existence et comme le reconnaissait déjà l’OMS en I978 comprend « le bien-êtrecomplet,physique,mental et social ».Nous voilà mis en position de ne jamais nous oublierpuisque maladie et guérison se dtisnguent de moins en moins au risque de créer une sociétéd’hypocondriaques et de dysfonctionnants permanents.Le seul crime que nous puissionscommettre à l’égard de notre santé,c’est de ne pas penser à elle jour et nuit.Dés l’enfance,noussommes requis de nous racheter de notre imperfection,de nous soucier de nos tendancesdangereuses,de nous remodeler des pieds à la tête.Ce travail sur soi,cette interminableinspection,dût-elle porter sur des choses aussi futiles que préparer son bronzage ou mincir enprévision des vacances est l’équivalent d’une rédemption morale. D’où ce paradoxe majeur :les intruments de notre libération et de notre mieux-être peuvent devenir aussi les instruments de notre asservissement.J’en veux pour preuve et jeterminerai la dessus ce qu’on appelle la médecine de prédisposition.Conquête thérapeutiquemajeure,je n’en doute pas, sur le plan médical,biologique. Toutefois on peut se demander s’ils’agit là d’un bienfait ou d’un cadeau empoisonné.Quelle serait l’avantage d’une existence quiserait en quelque sorte prédeterminée dans les gènes et les chromosomes et qui donneraitlieu,dés la naissance,à une prédiction forcément hasardeuse ?Outre que l’annonce d’unemaladie possible à 40 ou 50 ans aurait pour conséquence d’empoisonner la quiétude désl’enfance,de grandir avec une épée de Damocles suspendue au-dessus de la tête,la vie ne tireson prix, et sa beauté que d’être une histoire incertaine,non un programme.En ce domaine levoile d’ignorance est préférable à la connaissance infaillible.La vieille formule « je ne veuxpas le savoir » me paraît à cet égard plus sage que la volonté de transparence repeinte auxcouleurs du principe de précaution.A force de vouloir colmater l’angoisse,on créera desgénérations d’anxieux et de dépressifs. Un avenir connu d’avance est un non-sens et entraine
une confusion de toute volonté,de toute ambition,une dépréciation du quotidien.C’est leretour,sous les auspices de l’extréme modernité, du vieux partage clérical entre les élus et lesdamnés.Rien n’est écrit,en dépit de nos déterminismes,de notre naissance,de notre positionsociale,de notre race,de notre sexe, telle est la grande conquête de la liberté.La vie n’a de prixque de nous rester cachée,imprévisible,toute entière marquée du sceau de l’inconnu et duromanesque.Si l’innovation médicale devait se confirmer dans cette voie,la médecine perdraitson ancienne mission de soulager la souffrance et d’émanciper l’homme de la douleur.Elledeviendrait,sous couleur de tout guérir,la forme contemporaine de la prédestination et lesbiologistes,les professeurs les grands prêtres en blouse blanche de la fatalité.
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